1884 (Maroc, Chefchaouen)

Dans les ruelles de Chefchaouen, la “ville bleue” du nord du Maroc, chaque façade affiche une teinte unique, dans un camaïeu de bleus qui a fait la renommée de la ville. Ce choix de couleur s’est popularisé dans les années 1930, à l’époque où cette région était sous protectorat espagnol, contrairement à la majeure partie du pays placée sous protectorat français.

Cette division coloniale a laissé des traces distinctes dans l’urbanisme, la langue, et les influences culturelles locales. À Chefchaouen, les inscriptions et le système administratif en place jusqu’à l’indépendance étaient hispanophones, et la ville reste aujourd’hui encore hispanophone dans certaines de ses pratiques quotidiennes.

Le bleu, associé à la tradition juive sépharade, a aussi été renforcé par la présence de communautés juives fuyant l’Espagne franquiste, mais il est aussi utilisé pour ses propriétés pratiques : il éloigne les moustiques et garde les maisons fraîches. Sur cette façade, le numéro 1884 n’indique pas une date mais un numéro de maison, souvent apposé à la peinture, sans plaque officielle.

Chefchaouen incarne un Maroc singulier, influencé par l’Andalousie, l’Espagne coloniale et une topographie isolée qui a favorisé un style de vie distinct. Une ville où la couleur devient langage, entre mémoire, spiritualité et tourisme contemporain.