Avant les mots (Indonésie, Bali)

À Bali, les tout-petits sont au cœur d’une attention collective mêlant douceur, spiritualité et symbolisme. Selon la tradition balinaise, un enfant ne touche pas le sol pendant les premiers mois de sa vie : porté par ses proches, il est considéré comme encore “proche du ciel”. Ce n’est qu’à l’issue d’une cérémonie appelée nyambutin (ou nyabutan), vers six mois, qu’il est symboliquement relié à la terre.

Un autre rite marquant est l’otonan, célébré tous les 210 jours (cycle du calendrier pawukon), qui honore la venue de l’âme dans le monde des vivants. Ces rituels ne relèvent pas du folklore : ils façonnent une vision du monde où chaque naissance implique la communauté, les ancêtres, et les divinités.

Le langage n’est pas pressé. On chuchote parfois des mantras ou des nama perut (“noms de ventre”) avant de donner le prénom officiel. Dans ce contexte, le regard, la posture, les objets portés — ici un collier orné d’un singe en chocolat — deviennent les premiers langages d’un être encore en pleine traversée du seuil entre visible et invisible.